Radio Libertaire (non officiel)

Un peu d’air frais

l’atelier du documentaire

Émission du 3 septembre 2023

Travailleurs détachés, les dessous d’une exploitation

Avec nos invitées Tifenn Hermelin et Hélène Servel, réalisatrices du podcast Travailleurs détachés, les dessous d’une exploitation
Une enquête lauréate de la Bourse Rosenthal produite par le Studio Écran Sonore et diffusée en partenariat avec Blast.

Travailleurs détachés, les dessous d’une exploitation : écoute du podcast

  • Volet 1 : Leurs bras pour nos assiettes (41 min)
  • Volet 2 : Omerta‐Sous‐Serre (31 min)

En juillet 2011, dans la région de Cavaillon (Vaucluse), un jeune travailleur saisonnier Équatorien, Elio Maldonado, meurt des suites de déshydratation alors qu’il travaillait dans un champ à la récolte des melons.
Engagé par l’entreprise de travail temporaire espagnole Terra Fecundis, il faisait partie des travailleurs étrangers « détachés » — selon la terminologie de la législation européenne, qui concerne 10 000 personnes originaires d’Amérique latine, d’Afrique de l’Ouest ou du Maroc.
Des hommes et des femmes, acheminés en France depuis l’Espagne par des sociétés d’intérim espagnoles qui, sous couvert d’une législation encadrée par l’UE depuis une quinzaine d’années, profitent de ce régime qui permet la « mise à disposition » de travailleurs saisonniers, posé comme alternative au manque de main d’œuvre dans l’agriculture.

Ce documentaire est le fruit d’une enquête qui débute en 2018 dans les exploitations agricoles de la plaine de la Crau.

Le podcast en deux parties raconte la réalité de ces travailleurs et travailleuses agricoles aux conditions de logement indignes, et les journées de travail harassant dans les serres et les champs de fruits et légumes.
Les témoignages mettent en relief le poids d’une omerta et les mécanismes d’un système d’exploitation d’une main d’oeuvre étrangère captive.
La parole est donnée à celles et ceux — élus locaux, journalistes, agriculteurs, inspection du travail, comités de défense de travailleurs — qui, face aux menaces, peinent à désigner les responsabilités dans ces dérives d’une agro‐industrie dont les énormes profits se font au mépris des droits humains fondamentaux et de la législation.

Suite au décès du jeune Équatorien, le procès contre son employeur se tient dix ans plus tard, en 2022. L’employeur bénéficie d’une relaxe, sur décision de la Cour d’appel d’Aix‐en‐Provence.
Terra Fecundis, condamnée dans la plus grosse affaire de fraude sociale jamais jugée en France, parvient, au bénéfice du temps long des investigations et de la complexité des procédures, à maintenir son modèle d’activité en France sous le nom de Work for All.
D’autres sociétés de travail temporaire espagnoles ainsi que des exploitants agricoles ont fait l’objet de procès aux prud’hommes et au pénal, pour mauvais traitements, menaces, complicité de travail dissimulé.
L’exploitation intensive de la main d’oeuvre agricole étrangère continue de fonctionner à plein régime.